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mardi 23 juillet 2013

Salut Robert

Mardi 9 juillet. Tout début des vacances scolaires.  Le poussin a rendez-vous chez la pédopsychiatre.

Je l'aime bien, la pédopsychiatre. Elle est calme et posée, écoute, conseille, encourage. On ne la voit que de loin en loin - tous les un mois, un mois et demi - mais on sort regonflés à bloc de son cabinet. Elle dit qu'elle a un rôle de "chef d'orchestre": elle ne voit pas le petit très régulièrement mais elle est en contact avec les autres intervenants, la psychomotricienne, l'orthophoniste, la médecin scolaire.
Généralement, j'arrive avec plein de questions dans la tête, je ressors en ayant oublié d'en poser la moitié, et je me dis que la prochaine fois il faudra VRAIMENT que je les note, mes questions. 

Ce jour-là, comme d'habitude, on commence par faire le point de ce qui s'est passé depuis le précédent rendez-vous. Elle est au courant de l'équipe éducative de la semaine précédente, elle avait d'ailleurs écrit un petit mot qui avait été lu par la psychomotricienne. Elle pense qu'il vaut mieux, effectivement, que le petit continue à manger à la cantine l'année prochaine, quitte à le faire accompagner par l'AVS sur le temps périscolaire. Ce sera toujours mieux que de lui faire faire à pied le trajet école-maison deux fois supplémentaires, avec un raidillon à 17% de dénivelé et une baby-sitter qui s'occupera de lui comme elle pourra (ou pas).

Je sors ma pochette en carton qui contient les bilans médicaux et les divers documents administratifs - elle grossit à vue d'ieil, cette pochette. On regarde le "bulletin" scolaire, le bilan rédigé par la maîtresse, les dessins du petit. Elle essaie d'établir le contact, pose des questions sur les dessins, il esquive, comme d'habitude. Il n'aime pas venir ici, parler de lui-même, de pourquoi c'est si difficile de respecter les règles de l'école. J'ai essayé de lui expliquer pourquoi on venait, je ne sais pas si il a vraiment compris. C'est difficile d'expliquer "pédopsychiatre" avec des termes adaptés pour un enfant de quatre ans et demi.

Comme toujours, la pédopsy prend de mes nouvelles à moi, en écoutant VRAIMENT la réponse. Je m'autorise à baisser la garde et à lui dire que l'année scolaire a été très difficile, physiquement et mentalement, que je suis fatiguée d'avoir jonglé toute l'année entre mon boulot et le suivi médical du petit, mais que ça va, dans l'ensemble, mieux que la fois précédente. Pour l'année scolaire suivante, je n'ai pas demandé d'heures supplémentaires, ce sera un peu plus facile. Elle me dit simplement "oui, j'avais vu que ça n'allait pas fort, la dernière fois".

On parle de la suite des opérations. Elle me dit avec tout le tact possible que, tout de même, il va falloir songer à mettre en place une prise en charge médicamenteuse pour le petit. Nous en avions déjà parlé: normalement, les médicaments du TDAH, type Ritaline, sont prescrits à partir de 6 ans. Le poussin va avoir 5 ans en octobre, c'est un peu tôt mais elle pense tout de même que ce serait bien de commencer. Il y a beaucoup de répercussions à la maison, à l'école, dans la vie de tous les jours. Elle nous oriente vers un confrère parisien, spécialisé en TDAH, qui pourra faire les examens médicaux préliminaires, puis éventuellement la prescription.

Sujet épuisé, coordonnées du spécialiste notées, je prends une grande respiration et je pose une question qui me taraude depuis un bon moment. En observant le poussin dans sa relation avec les autres enfants,  la manière dont il communique avec nous,  sa façon d'éviter si souvent le regard des autres, en regardant évoluer les petits voisins au parc, je me dis qu'il y a, tout de même, une nette différence de fonctionnement. Le nôtre est TDAH, certes, mais cela n'explique pas tout. Je dis tout cela à la psy, je tourne un peu autour du pot, je finis par évoquer la médecin scolaire qui a noté dans son carnet, en lettres capitales: "TED?"

Le mot est lâché. TED, c'est le sigle de Trouble Envahissant du Développement, que l'on appelle aussi, parfois, Trouble du Spectre Autistique.
Autisme. Le terme fait peur, et pourtant, peur ou pas peur, je pense que, oui, mon fils est atteint d'une forme d'autisme. Peut-être "léger" - il parle, il exprime des émotions, il va a l'école - mais bien là, et suffisamment handicapant pour que j'arrête de faire l'autruche.

La psy n'est pas du tout surprise de ma question. Elle me répond doucement que oui, il y a probablement un souci de cet ordre-là, que cela se remarque dans le mode de communication du gamin, dans la manière qu'il a de "décrocher" parfois, d'être là sans être là. Elle pensait justement nous adresser à l'hôpital Robert Debré, à Paris, dans lequel il y a un Centre de Ressources Autisme (CRA). Là-bas, ils feront une batterie de tests complète au poussin, confirmeront au passage le TDAH (les deux troubles sont souvent associés, je l'ai appris récemment), feront un test de QI. Ce sera complet, on saura à quoi s'en tenir, mais cela prendra du temps, car le service est très demandé. Compter 18 mois à 3 ans d'attente. 

J'ai pleuré un coup, quand même. C'est une chose de se poser la question, c'en est une autre d'avoir confirmation par un professionnel de santé. Heureusement, il y a une boîte de mouchoirs à disposition en permanence sur le bureau de la psy. Elle s'est excusée de me faire pleurer, comme à chaque fois. Et comme à chaque fois, je lui ai répondu que ce n'était pas de sa faute. Pendant ce temps, le petit faisait une construction en Légo en évitant soigneusement de se mêler de la conversation.

En sortant, le poussin me dit: "Maman, on va au restaurant?"
C'est notre petit rituel d'après-psy. On a souvent rendez-vous en fin de matinée et, généralement, je sors de là pas mal chamboulée, sans la moindre envie de faire à manger. Nous allons dans un petit restaurant chinois avec buffet à volonté, bouchées aux crevettes et sauce piquante pour moi, riz cantonais et soda pour le petit. Je le regarde manger en l'observant d'un nouvel oeil. Le mot est lâché, pourtant c'est toujours mon gosse, il n'a pas changé depuis ce matin. C'est juste mon regard qui a changé. Il va me falloir du temps pour me faire à l'idée, je crois.

2 commentaires:

  1. Le diagnostic, quel qu'il soit permet de mettre en place la prise en charge la plus adaptée possible. Un mal pour un bien. Il est important pour votre loulou que les "gros" mots soient posés. Je pense bien à vous. Je connais ça (en plusieurs exemplaires ;o)

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  2. Oui, les "gros" mots, ceux qui ont du mal à passer...
    C'est important, et on fera faire le $diagnostic, mais ce n'est pas facile.

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